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MyDeal.ma : qu’est-il arrivé au pionnier du web marocain ?

MyDeal.ma : qu’est-il arrivé au pionnier du web marocain ?

Depuis plusieurs mois, de nombreux internautes marocains se posent la même question : le site de deals MyDeal.ma était-il vraiment « en pause pour renaitre sous d’autres cieux » comme l’affirme son site ? Ou a t’il mis la clé sous la porte ? Qu’est-il arrivé au premier site d’achats groupés du royaume ?

Depuis ce matin, un pas de plus est franchi : le site n’est plus accessible. Alors, cette fois-ci, peut-on dire que le site, qui avait réalisé 4 millions de dollars de ventes sa deuxième année, est définitivement mort ? 

L’histoire est plus compliquée qu’elle paraît.

Nous avons rencontré Mounia Rkha, co-fondatrice et ancienne gérante de l’entreprise, ainsi que Nabil Sebti, actuel gérant de la startup.

L’histoire d’un des sites qui a fait le e-commerce marocain

MyDeal.ma était né sous des bons cieux. Le site a été lancé début 2011, alors que le e-commerce au Maroc n’en était encore qu’aux frémissements, par une équipe de co-fondateurs expérimentés bien décidés à s’imposer comme les pionniers du web marocain.

Derrière le projet, se trouvait Mounia Rkha, analyste au sein du célèbre fonds d’investissement en capital risque français Ventech, rejointe par trois co-fondateurs prenant le rôle de conseillers stratégiques, Lara Rouyrès et Tatiana Jama alors co-fondatrice de Dealisissme, une entreprise de deals français rachetée au bout d’un an, pour plus de 3 millions d'euros, par LivingSocial, et Jonathan Benhamou, président et fondateur de Novapost, un service de digitalisation des RH qui vient de lever 17,5M$ pour continuer son expansion aux Etats-Unis. Karim Zaz, ex-directeur général de l’opérateur de téléphonie mobile Wana, devenu Inwi, les rejoint rapidement en tant qu’actionnaire principal. 

Lancé en janvier 2011, le site explose rapidement. A la fin de la première année, le site a déjà dépassé ses prévisions de chiffre d’affaire, emploie 25 employés et lève 2 millions de DHM, soit près de 240 000USD, auprès de MNF. En 2012, l’entreprise enregistre 4 millions de dollars de volume d’affaire. Pour beaucoup de Marocains, MyDeal.ma était le site sur lequel ils avaient effectués leurs premiers achats en ligne, explique Mounia Rkha.

Le succès du site, estime la co-fondatrice, s’explique par un avantage de primo-entrant, même si cela ne s’est joué qu’à un mois – moins d’un mois plus tard, c’est en effet au tour de Hmizate d’arriver sur le marché, suivi de près par Superdeal.ma – ainsi que d’un avantage de primo-entrant sur les deals d’hôtels.

La nécessité du pivot 

Pourtant les fondateurs réalisent vite que ce business model n’est pas rentable, ni au Maroc, ni à l'étranger. Le conseil accepte donc la décision de Mounia Rkha de transformer MyDeal en un regroupement de sites offrant divers services en ligne comme la vente de tickets, un service de box, ou encore un site de recommandations de restaurants.

En mai 2013, Mounia Rkha quitte son poste pour rentrer, pour des raisons personnelles, vivre en France.

Elle part confiante ; le site avait déjà engagé son pivot avec le lancement de trois sites dont MyDealMarket, préparait une deuxième levée de fonds, et surtout était aux mains d’un nouveau gérant, Nabil Sebti, qui devait apporter du sang neuf et permettre à MyDeal de changer d’identité et de positionnement.

Pourtant le pivot ne se passe pas exactement comme prévu. Le chiffre d’affaire et les liquidités baissent. De son point de vue extérieure, Mounia estime que l’entreprise s’était « trop concentrée sur les nouvelles activités qui ne payaient pas assez et a délaissé la vache à lait qu’étaient les deals ».

Nabil acquiesce, il y avait un manque de concentration : « beaucoup trop de services ont été lancés alors que MyDeal était en pleine croissance », explique t’il. L’une des conséquences a été la nécessité d’embaucher – l’équipe a eu jusqu’à 40 employés - ce qui a pesé sur la trésorerie de l’entreprise. La première chose que Nabil a fait quand il est arrivé a d’ailleurs été de fermer, avec le concours des actionnaires, une partie de ses nouveaux services. Pour autant, il ne pense pas que MyDeal.ma ait été abandonné mais estime que les ressources ont été mal allouées.

Mounia estime aussi que l’entreprise a connu trop de changements stratégiques pour inspirer confiance aux investisseurs auprès desquels l’entreprise avait besoin de lever des fonds.

Mais ce n’est pas le pivot qui a emmené MyDeal.ma à la situation actuelle. L’ancienne gérante et le gérant actuel sont d’accord, la startup aurait pu remonter la pente. Dès septembre 2013, la courbe de croissance repartait à la hausse et un investisseur étranger avait donné son principe d’accord, témoigne Nabil Sebti.

Une mort incertaine

Non, la startup souffre d’un problème qui lui est extérieur : l’actionnaire principale et co-gérant, Karim Zaz est actuellement en garde à vue pour des raisons sans relation avec MyDeal.ma, ce qui empêche la prise de décisions lors des assemblées générales et donc le bon fonctionnement du site. Une situation très triste, rappelle le gérant, pour la startup évidemment, mais aussi pour Karim Zaz et sa famille. Malgré la situation actuelle, Nabil Sebti a tenu à rappeler le rôle clé qu’a Karim au sein de l’entreprise et de toute l’expérience qu’il a apporté.

Pour autant, l’entreprise n’est pas morte. « La société existe toujours juridiquement », explique Nabil Sebti à Wamda. « J’en suis toujours le gérant », continue t’il.

Est-ce que cela aurait pu être évité ? Oui, estime le gérant. « Si cela avait été une société anonyme [au lieu d’une SARL], cela aurait été beaucoup plus simple parce que les procédures d’administration sont plus souples. Si l’on n’avait pas été co-gérants, cela aurait été un peu moins difficile, continue t’il, et surtout si Karim Zaz n’avait pas été actionnaire principal, cela aurait été facile. » 

Quelles leçons peut-on en tirer ? Malheureusement, le gérant rappelle, les entrepreneurs n’ont pas trop le choix : à moins d’avoir, dès le début, les 300 000 dirhams nécessaires à la création d’une SA, ils devront opter pour un statut de SARL. Ils peuvent en revanche réfléchir dès le début sur la façon dont les décisions se prennent : qui gère l’entreprise, comment se prennent les décisions, dans quel cadre, quelles décisions se prennent à la majorité, etc.

Cette histoire rappelle que le sort d’une startup dépend toujours un peu du hasard de la vie. Même la startup la mieux ficelée peut tomber par un coup de malchance, que ce soit suite à une crise financière et au gel des investissements, comme ce fut le cas pour le réseau professionnel Unyk, ou à un incident politique lors du lancement, comme ce fut le cas pour Digital Mania et son jeu Tunis 2050.

Mais, les entrepreneurs peuvent toujours se protéger de ce genre de situations en portant une attention particulière à leur trésorerie, en réfléchissant dès le début au management de l'entreprise en cas de problème, et en adoptant une attitude d'apprentissage permettant de pivoter, comme l'ont fait Digital Mania ou Unyk.

MyDeal renaitrera t'il d'entre les flammes ? Peut-être. En tout cas, les anciens de MyDeal ont beacoup tiré de cette expérience, et il y a fort à penser que nous en verront les effets positifs quand ils rejoindront ou créeront leurs propres startups.

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