Avec ilBoursa, le secteur boursier tunisien rentre dans le 21ème siècle

ilBoursa, des graphiques et des explications (capture d'écran)
Certains entrepreneurs rêvent que leur entreprise soit connue du plus grand monde, d’autres qu’elle génère de l’argent, certains encore ambitionnent de changer les règles d'une industrie.
Ismail Ben Sassi, 25 ans depuis quelques jours, a déjà atteint ces trois objectifs.
Son site d’informations boursières ilBoursa.com est un des 20 sites info les plus visités de Tunisie selon Alexa, une entreprise rentable dès la première année et une startup qui a bouleversé un des secteurs les plus opaques du pays.
La bourse, un secteur à disrupter en Afrique
« Je suis passionné par la bourse, explique Ismail Ben Sassi avec un sourire qui ne trompe pas. Depuis que je suis petit, je lis des bouquins, je regarde des émissions. »
Pourtant, il y a encore cinq ans, le secteur boursier tunisien semblait sortir d’une autre ère.
« Il n’y avait rien sur la bourse en Tunisie » se rappelle Ismail Ben Sassi.
Seuls quelques médias traditionnels généralistes couvraient l’actualité boursière, se contentant souvent de publier le cours des actions et les grandes annonces sans les analyser.
Acheter et vendre des actions n’était pas plus simple. Les Tunisiens devaient encore décrocher leur téléphone pour demander à leur courtier d’effectuer les opérations.
Le milieu de la bourse était opaque et géré par le relationnel, témoigne l'entrepreneur.
Bref, la bourse était essentiellement le terrain de jeu d’un petit groupe d’initiés auquel le grand public avait difficilement accès malgré un intérêt certain.
Sur les 11 millions de Tunisiens, 40 000 investissent en bourse en dépit du manque d’outils appropriés et autant s’y intéressent sans investir, estime Ismail Ben Sassi.
« Je suis parti d’un constat : qu’il y avait une niche à exploiter » explique t-il.
Un média complet
En 2012, Ismail Ben Sassi (en photo ci-dessous) est en stage chez ABCbourse.com, un site d'informations boursières en France. Il les convint de s’associer à lui pour développer le premier site d’informations boursières en Tunisie.
L’entreprise française apporte du capital et la plateforme technique. Ismail, associé majoritaire, gère le site à distance tout en continuant ses études et sa carrière en France.
En septembre, il démissionne de la banque Edmond de Rothschild à Paris pour se concentrer sur son service.
Le site est désormais dans le top 20 des sites infos les plus visités en Tunisie, comptabilisant 80 000 Tunisiens visiteurs chaque mois, selon les chiffres de la startup.
IlBoursa publie les cotations de tous les pays francophones d’Afrique, couvre l’actualité boursière tunisienne, produit de l’analyse, anime des forums et propose des jeux didactiques.
« On produit notre propre contenu écrit et vidéo » explique fièrement le jeune entrepreneur.
Le ton est sympathique, la production soignée et l’analyse facile d’accès mais complète. Les néophytes comme les initiés y trouvent ce dont ils ont besoin pour investir en connaissance de cause.
Se lancer sur un marché opaque
Evidemment, quelques acteurs en place n’ont pas apprécié ce vent de changement.
« Il y a des gens qui sont contre cette ouverture » explique t-il.
L'entrepreneur a même reçu quelques menaces d'acteurs mécontents qu'on dénonce leur manque d'éthique.
Ismail a bien rigolé mais n’a rien changé.
Il a aussi fallu à Ismail Ben Sassi créer une relation de confiance avec les entreprises côtées.
« On essaie de changer les cultures, d’expliquer aux patrons des entreprises côtées que c’est bénéfique pour eux de s’ouvrir » détaille t-il.
Et vu le nombre de patrons interviewés par ilBoursa, il semblerait qu’ils aient étés convaincus.
Rentable dès la première année
« Dès la première année, on était rentable » s ‘enorgueilli l’entrepreneur.
En attendant que son audience atteigne une taille critique, le jeune homme avait misé sur la technologie. En 2012, le vente à la Bourse de Tunis d’un jeu permettant aux internautes de s’entrainer avec de l’argent fictif, lui permit de couvrir ses coûts.
L’année suivante, c’est la publicité qui lui permit de rester rentabl.
Les annonceurs ont sauté sur l’occasion de toucher des Tunisiens - médecins, avocats ou directeurs d’entreprise - dont le pouvoir d’achat dépasse de 100 à 200 fois la moyenne tunisienne.
Ismail Ben Sassi ne compte pas s’arrêter là.
« On n’a pas de concurrent en Afrique [sauf en Afrique du Sud] » ajoute t-il.
En ce moment, il lève des fonds pour recrutrer des rédacteurs locaux dans les pays africains francophones avec la Cote d’Ivoire, le Maroc puis l’Algérie en ligne de mire. Dans un second temps, il ambitionne de développer un site en anglais pour se déployer au Nigéria, au Kenya et dans les autres pays anglophones, en espérant bientôt devenir un courtier en ligne.