La stratégie gagnante d'Azur Systems disséquée
Walid El Alaoui Mrani fait partie de ces personnes qui se donnent les moyens d’atteindre leurs objectifs. Son diplôme d'ingénieur en poche, le jeune marocain file à Paris faire deux ans d'école de commerce. Content de sa formation, il rentre au Maroc. « Je n’avais aucune idée [d'entreprise], la seule chose dont j’étais sûr, c’était que je voulais créer une société au Maroc ».
Cinq ans plus tard, l’entrepreneur, jusque là très discret, est à la tête d’Azur Systems, une startup de 10 employés qui affiche 3 millions de dirhams (340 000M USD) de chiffre d’affaire l’an passé, une longue liste de clients institutionnels, et prépare sa première levée de fonds et son expansion à l’international.
Azur Systems est un one-stop shop pour organisateurs d’événements. Les organisateurs peuvent y trouver des services pour préparer leurs appels d’offre, gérer leurs projets, créer un site internet pour leurs évènements, les promouvoir et même mettre en place une plateforme de networking à destination des participants.
Derrière ce résultat, cinq ans de travail, de persévérance et de concentration absolue sur le produit. Nous avons rencontré Walid et lui avons demandé de revenir avec nous sur cette stratégie et sur ses plans pour l’avenir.
Observer le marché, repérer les besoins
En 2009, quand Walid rentre au Maroc, il créa un site de livraison à domicile de repas, appelé Quelmenu.com, similaire à HelloFood, le site de Rocket Internet, lancé quatre ans plus tard. Ce fut un échec, le Maroc n’était pas prêt pour ce genre de service et ne l’est toujours pas, estime t’il, mais cette expérience lui permit de découvrir un besoin, cette fois-ci, bien réel.
Contacté par un organisateur d’événements qui avait besoin d’une plateforme pour permettre aux participants de réserver un hotel en ligne, il réalise que les agences évènementielles travaille toujours de façon archaïque et se met donc à développer des solutions pour faciliter la vie des organisateurs. Ce ne sont pourtant pas les solutions pour faciliter l’organisation d’évènements qui manquent mais elles sont fragmentées, difficilement intégrables ou concentrées sur un marché local. L’entrepreneur lance donc Azur Systems en 2010.
La plateforme permet notamment de systématiser la création de
badges
La technique du cheval de Troie
« Aujourd’hui on a la plupart des agences d’évènementiel marocaines, ainsi que des institutionnels du type BMCE Bank ou OCP » explique Walid El Alaoui Mrani.
Pour en arriver là, il a fallu de la patience. « C’est tout un travail de sensibilisation et d’éducation [pour convaincre les gros groupes] » explique t’il. L'entrepreneur choisit, dès le début, de répondre aux besoins les plus basiques des institutionnels et de progressivement les convaincre de passer à des services plus innovants et ambitieux.
C’est ainsi que la startup a réussir à convaincre le Ministère de l’Intérieur. « La porte d’entrée c’était un site web pour un événement. On avait baissé le tarif au maximum pour pouvoir accéder au compte et petit à petit on les a sensibilisé à l’importance d’outils comme l’application mobile pour l‘événement, la plateforme de networking et le emarketing. »
La plateforme de networking pour les participants
Travailler avec des gros comptes, un défi surmontable
Choisir de travailler avec des gros comptes, surtout au Maroc, peut sembler un choix audacieux tant ces groupes souffrent de hiérarchïte et d’administrationite aigue.
« C’est vrai que c’est un casse-tête, il faut présenter le produit à plusieurs niveaux de hiérarchie parce que personne ne veut prendre la responsabilité et le paiement tarde énormément » avoue t’il, mais si l’on prend ces données en considération, cela n’est pas insurmontable explique t'il. De toute façon, au Maroc, le donneur d’ordre principal c’est l’Etat, donc que le client soit une agence d’évènementiel ou l’Etat lui-même, la problématique de paiement sera la même.
Devenir scalable et s’ouvrir à l’international
La startup propose à l’heure actuelle deux types d’offres : une en SaaS, pouvant facilement être déployée à grande échelle, et une personnalisable, amenée à diminuer pour permettre à la startup de devenir scalable.
Pour grandir, la startup va devoir s’exporter. Depuis plus an, Azur Systems dispose d’une représentation à Dubaï, c’est-à-dire un numéro de téléphone et une adresse postale à Dubaï et a participé à plusieurs salons dans la région. « Mais pour s’attaquer à un marché, il faut une équipe sur place pour nouer des partenariats, ce qui coute assez cher » explique l’entrepreneur.
Azur Systems à un évènement à Abu Dhabi
Pour se préparer aux défis du développement à l’international, l’entrepreneur a participé au programme Silicon Valley du MIT Entreprise Forum qui permet à 18 startups en croissance de rencontrer des investisseurs et mentors de la Silicon Valley pendant une semaine. Si l’entrepreneur n’a pas trouvé d’investisseur - « un investisseur dans la Silicon Valley ne va pas investir dans une entreprise qui n’est pas basée dans la Silicon Valley » explique t’il – il a pu commencer à réfléchir à sa stratégie de croissance et d’internationalisation avec des mentors.
Chercher les bons mentors, au bon moment
C’était une première, jusque là, Walid El Alaoui Mrani n’était pas un habitué des concours et des évènements de mentorat, et ce volontairement.
Après avoir participé, en 2006, à l’émission de télé-réalité Challengers, qui opposait des entrepreneurs, il décide de ne plus dédier son temps à ce genre d’évènements. « C’était beaucoup de show pour pas grand chose » explique t’il. « Au Maroc, on est une startup mais on est aussi une entreprise qui doit être rentable parce que les fonds tardent à venir » estime t’il pas le temps donc de participer à ce genre de concours.
Lorsqu’il lança Azur, le jeune homme décida donc de se focaliser sur le produit et le marché, « je ne voulais pas participer à des émissions et rencontrer des membres de l’écosystème tant qu’on n’avait pas notre produit, nos premiers clients » continue t’il.
Ayant enfin une équipe opérationnelle forte, l’entrepreneur peut désormais prendre le temps de rencontrer des mentors et de participer à des compétitions. L’entrepreneur a notamment intégré le prestigieux programme de sélection de Endeavor. « Au fur et à mesure des échanges, avec des entrepreneurs, des chefs de grandes sociétés, on change de stratégie, on voit des failles, on prend du recul » surtout sur ce qui relève de levée de fonds et scalabity, explique t'il.
La startup qui a longtemps fonctionné sur le modèle d’autofinancement, et qui a, plus tard, pu bénéficier de l’aide du CMI est en discussion avec des investisseurs au Maroc, ce qui devrait lui permettre d’attaquer sa stratégie d’internationalisation avec plus de sérénité.