Les pays émergents ont-ils déjà inventé le futur d'Internet ?
Oui, Internet a vu le jour en Amérique du Nord et en Europe, mais son futur se joue désormais dans les pays émergents. C’est en tout cas l’analyse de Yiibu, un cabinet de conseil et agence de design en expérience utilisateur, dans une récente présentation SlideShare.
Si le futur d’internet se joue dans ces pays, c’est d’abord parce que c’est un immense marché presque intouché. Contrairement aux pays développés où le taux de pénétration d’internet dépasse les 80% dans certains pays, comme le Canada, l’Allemagne ou la Corée du Sud, ce taux de pénétration est inférieur à 40%, voir à 20%, dans de nombreux pays en développement, ce qui représente des millions d’internautes en devenir.
Mais si le futur d’internet se joue dans ces pays, c’est aussi parce que ces populations rejoignent la course à une vitesse épatante. En 2014, la moitié des sites du Top 20 d’Alexa, un service qui fournit des statistiques sur le trafic web mondial et qui recense, entre autres, les 20 sites les plus visités au monde, venait déjà d’économies en développement comme la Chine, l’Inde ou encore la Russie. Et avec la baisse des prix des smartphones conçus spécialement pour ces nouveaux consommateurs, le nombre de personnes pouvant se permettre un abonnement à la 3G explose. Imaginez à quoi ressemblera le Top 20 dans quelques années.
C’est surtout la façon dont ces nouveaux utilisateurs conçoivent Internet qui va changer la donne. Pour eux, Internet ne ressemble en rien à ce que les Européens ou Américains ont pu découvrir il y a quinze ans. Internet est devenu social, P2P, mobile et e-commerce ; fini l’Internet 1.0 sur Explorer, explique cette présentation de Yiibo. « Ne connaissant pas l’ancien internet, ils ignorent ce qui est “normal” et transforment les contraintes en opportunités. » Dans ces pays, l’innovation est libérée. « Ce qui nous semble futuriste, peut tout simplement sembler nouveau et pratique à d’autres. »
L’e-commerce, c’est les réseaux sociaux.
Dans les pays émergents, e-commerce et réseaux sociaux se mélangent. Au Koweït, les vendeurs de tout âge utilisent Instagram pour vendre des moutons ou des fruits secs, explique l’étude, alors qu’en Thaïlande, plus de 10 000 petites entreprises utilisent Facebook pour vendre leur produit.
Les acheteurs passent commande sur Whatsapp ou en message privé ou commentaire de statut sur Facebook, tandis que les entrepreneurs gèrent leurs e-stores improvisés directement sur leur portable, et ne s’embêtent pas avec du e-paiement ou des formulaires en ligne.
L’e-commerce, c’est se passer d’intermédiaires
Un autre terrain de jeu pour ces petites entreprises et vendeurs est les places de marché. En Chine, 90% des ventes en ligne se font sur des places de marché, marketplaces en anglais. La plus large est Tmall, créée par le géant chinois du e-commerce Alibaba. Cette marketplace compte plus de 180 millions de consommateurs, 150 000 marchands et 200 000 marques bien établies, comme Apple, Peugeot, ou encore Lamborghini. Alibaba a aussi lancé une version C2C appelée Taobao sur laquelle les particuliers peuvent vendre produits comme services.
Le marketing est multiplateforme, et d’une facilité enfantine
Le e-commerce se joue sur de nombreux autres plateformes et sous une variété de formes, continue l'étude qui prend l'exemple de Jing, cette jeune chinoise qui documente sa vie d’étudiante aisée à Londres sur son blog et vend sur Taobao, en quelques heures, les produits de luxe qu’elle porte sur son blog.
Le e-paiement simplifié
En Chine, le portefeuille virtuel et le e-commerce sont des concepts compris de tous grâce à l’appli WeChat, une appli à la Whatsapp devenue une plateforme proposant, notamment, des mini-sites et des services de paiement et de virements en ligne. Au Kenya, en Inde et aux Philippines, c’est Mpesa qui domine le e-paiement grâce à son service de virement et paiement par SMS.
Autre innovation, toujours en Chine : le paiement en séquestre. Grâce à son service Alipay, Alibaba ne transfère le paiement aux vendeurs qu’une fois le colis reçu et accepté par l’acheteur, un bon moyen de faciliter la confiance.
La continuité offline/online
Alors que dans les marchés matures, les QR codes ont bien du mal à convaincre les internautes, qui les trouvent trop compliqués, ils rencontrent un très gros succès en Chine. WeChat, par exemple, génère un QR code par compte et beaucoup d’utilisateurs les impriment sur leurs cartes de visite ou leurs posters promotionnels pour rediriger les gens vers leurs comptes et leurs mini-sites.
Repenser la livraison
En Afrique, où les services postaux sont inexistants ou insatisfaisants, le future du e-commerce pourrait prendre la forme de drones. « Pourquoi construire des routes qui coûtent cher pour desservir des régions rurales quand des drones peuvent tout aussi bien faire le travail ? » demande Wired dans un article dédié au développement des droïdes de livraison.
Pendant ce temps, en Russie, le site de e-commerce mode, LaModa, envoie des vendeurs directement chez les acheteurs. Les vendeurs y viennent les mains pleines de vêtements, conseillent les clients, encaissent les achats et repartent avec les vêtements non achetés.
Je vous encourage vivement à lire toute cette présentation qui contient beaucoup d’autres exemples, d’anecdotes et de chiffres sur les nouvelles façons dont les pays émergents révolutionnent internet.